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Le billet de Pascal Perrineau - François Fillon « dans le jeu » ou « hors jeu » présidentiel ?

A quinze jours du premier tour de l’élection présidentielle, le paysage politique tel que le dessinent les intentions de vote recensées par les instituts de sondage comporte, parmi de nombreuses « nouveautés », celle de voir le candidat de la droite et du centre, François Fillon, régulièrement annoncé en troisième position avec un niveau de 19% d’intentions de vote derrière Marine Le Pen et Emmanuel Macron crédités tous deux de 23,5% (sondage Elabe du 5 avril 2017). Or, lors de la dernière consultation électorale des élections régionales de décembre 2015, la droite et le centre rassemblaient 28% des suffrages, roue dans roue avec le Front national (28,4%) et sensiblement devant un PS et ses alliés à 25% et une gauche de la gauche à 8,5%. Où sont passés les électeurs de la droite et du centre ?

Dans le sondage IPSOS-CEVIPOF du 3 avril, on peut mesurer l’ampleur des reclassements qui ont affecté la droite et le centre. Alors que Marine Le Pen garde 74% des électeurs régionaux du FN, Jean-Luc Mélenchon captant 76% des soutiens régionaux du Front de gauche, François Fillon n’attire que 50% des électeurs qui avaient soutenu les listes LR-UDI-Modem-divers droite de décembre 2015. Certes, cela est mieux que Benoît Hamon qui ne capte que 25% des électeurs du PS et de ses alliés de 2015. Cette « évaporation » record des électeurs socialistes attirés par la galaxie Macron et la contestation mélenchoniste sont en train de réduire à la portion congrue le candidat présidentiel du PS, crédité dans le sondage Elabe de 9% d’intentions de vote. La dispersion de l’électorat de droite, tout en étant plus mesurée que celle de l’électorat socialiste, est néanmoins importante. Cette dispersion joue avant tout au profit d’Emmanuel Macron qui attire pour l’instant 26% des électeurs de la droite et du centre de 2015. La séduction macroniste est beaucoup plus importante que celle de Marine Le Pen (6%), l’abstention et la concurrence souverainiste de Nicolas Dupont Aignan faisant le reste.

 Dans la dernière ligne droite, un éventuel retour de François Fillon ne peut se nourrir que d’une reconquête des électeurs de droite et du centre dispersés, à l’état gazeux, dans « l’espace central » d’Emmanuel Macron et, à un moindre degré, dans l’escarcelle du Front national et l’espace souverainiste de Nicolas Dupont-Aignan. Interrogés sur leurs éventuels « seconds choix » dans la perspective de l’élection présidentielle, 19% des soutiens d’Emmanuel Macron, 20% de ceux de Nicolas Dupont-Aignan et 18% de ceux de Marine Le Pen, pourraient se tourner vers François Fillon. Tous les électorats restent, à des degrés divers, « fragiles ». Le candidat de la droite et du centre continuera-t-il à porter la croix des « affaires » ou parviendra-t-il à exister à nouveau comme le vecteur d’expression des attentes du « peuple de la droite et du centre » ? Selon la réponse donnée à cette question, la capacité de reconquête de François Fillon sera forte ou mesurée et la configuration du second tour de l’élection présidentielle sera très différente.