Émile Magazine

View Original

Maël de Calan : "je me présente pour faire vivre les idées de la droite modérée au sein du parti LR"

Maël de Calan (promo 2003) est l’un des six candidats déclarés à briguer la présidence du parti Les Républicains. Cet alumni âgé de 37 ans, ancien porte-parole de la campagne d’Alain Juppé pour les primaires, se pose en défenseur d’une droite « ouverte » et « modérée ». Pour Émile, il revient sur les raisons de sa candidature et les liens qu’il entretient avec les autres personnalités politiques de la droite. 

Propos recueillis par Anne-Sophie Beauvais (promo 2001)

Lors du Congrès de l’UMP en 2012, vous aviez déposé une motion parrainée par Edouard Philippe, Bruno Le Maire ou encore Thierry Solère. Comment vous avez perçu la formation des constructifs et quelles sont les relations que vous entretenez avec vos anciens camarades ?

J’entretiens une proximité à la fois amicale et intellectuelle avec eux. Nous partageons souvent la même conception de la politique et de la droite, mais nous avons des différences stratégiques majeures. Édouard Philippe, par exemple, a choisi de rejoindre Emmanuel Macron pour peser sur sa politique. De mon côté, je pense qu’un accord de gouvernement aurait été nécessaire. Je suis favorable à ce que la droite et la gauche puissent travailler ensemble sur certains sujets, comme cela se fait en Allemagne, mais sur la base d’un accord politique. D’autant que nous sommes en désaccord avec Emmanuel Macron sur des sujets majeurs. En matière fiscale par exemple, avec la suppression de la taxe d’habitation qui va creuser le déficit, ou le choix d’augmenter la CSG alors que c’est la TVA qui était le bon instrument pour financer une baisse de cotisations sociales… Mais aussi des sujets de société, comme la généralisation de la PMA à laquelle je suis opposé.

En ce qui concerne les Constructifs, c’est encore une autre question. Ils pensent que notre parti est mort, et veulent précipiter son éclatement, alors que je pense que nous pouvons et que nous devons l’éviter. C’est le sens de ma candidature : faire vivre les idées de la droite modérée au sein des Républicains.

Si jamais vous ne figurez pas au deuxième tour, de qui vous vous sentiriez le plus proche ?

Il y a six candidats sur la ligne de départ, mais il n’y a que deux lignes. Une première - très clivante sur la forme et contestataire sur le fond - dans laquelle se reconnaissent la plupart des candidats dont Laurent Wauquiez. Et une seconde - ouverte sur la forme et équilibrée sur le fond - que je suis malheureusement le seul à porter. Au sein des Républicains, je me reconnais dans des personnalités comme Xavier Bertrand, Valérie Pécresse ou Alain Juppé bien sûr, mais parmi les candidats à la présidence des Républicains, c’est plus difficile. Si nous sommes battus, nous structurerons un courant pour faire vivre au sein des Républicains les idées de cette droite ouverte, européenne et modérée, qui est majoritaire dans notre électorat.

Laurent Wauquiez est, pour le moment, le favori. Comment vous positionneriez-vous s’il remporte la présidence ?

Ce que je souhaite, c’est que les Républicains restent une famille unie dans laquelle toutes les sensibilités de la droite et du centre puissent se reconnaître. Et je pense que c’est encore possible, parce que nous avons en partage un socle politique commun. Toutefois, il ne faut pas croire que le rassemblement se produira par enchantement, en donnant des postes dans l’organigramme du parti ou en laissant à chacun sa liberté de parole. Laurent Wauquiez nous dit : « si je gagne, tout le monde aura sa place et pourra parler comme il l’entend ». Mais le rassemblement, ce n’est pas ça !

Le rassemblement exige d’abord de mettre calmement sur la table ce qui nous rapproche et ce qui nous sépare, puis de définir un point d’équilibre, dans lequel toutes les sensibilités pourront se retrouver. Certains sujets sont pour nous essentiels : la volonté de défendre une Europe forte et unie ; la volonté de pousser les réformes économiques à leur terme ; une culture de gouvernement à laquelle nous sommes très attachés ; le refus de toute forme de rapprochement avec le Front national... Voilà quelques sujets qui doivent impérativement figurer au cœur des Républicains.

Cinq des six candidats déclarés à l’élection pour la présidence ont moins de 50 ans. Pensez-vous qu’il y a un effet post-Macron chez les Républicains ?

La réponse à l’élection d’un président de 39 ans ne peut certainement pas être le retour de la vieille garde. Mais le renouvellement des visages ne sera bénéfique que s’il s’accompagne d’un changement radical de nos pratiques politiques. Si on se contente de changer de génération ou de visage tout en reproduisant des pratiques dont plus personne ne veut, notre image restera détestable et nous repartirons pour un cycle de défaites. Les Républicains doivent une fois pour toutes se débarrasser du cynisme, de la mauvaise-foi, du sectarisme, et de la démagogie « sondagière ». A écouter certaines déclarations récentes, il y a encore du travail !

Macron a-t-il quelque part commencé cette rénovation des pratiques ?

Je suis assez sceptique. Qu’il ait chamboulé le paysage politique, c’est incontestable. Mais La République En Marche a des pratiques qui dégradent considérablement l’image de la politique. Sur le plan éthique, ils ont réussi en quelques mois la contre-performance de faire pire que leurs prédécesseurs. Et que penser du mode de désignation de leurs candidats aux législatives, qui relevait du pur casting ? Le choix s’est fait en fonction du profil supposé le plus populaire auprès des électeurs, sans aucune considération pour la compétence, le sérieux ou tout simplement l’implication dans les affaires publiques. Cela aboutit à une majorité hétéroclite, qui offre à l’Assemblée le spectacle de l’incompétence et du scandale. Emmanuel Macron a fait exploser un système politique obsolète. Mais pour le remplacer par quoi ? Pour que la rénovation politique soit fructueuse, elle doit être fondée sur l’exigence et l’éthique.


Quand vous pensez à votre carrière politique, est-ce qu’il y a trois mots qui vous viennent spontanément ?

L’espoir que l’action politique suscite chez beaucoup d’électeurs et qu’il ne faut pas décevoir, les sacrifices immenses qu’elle exige, et l’aventure humaine qu’on vit et qui rend les sacrifices acceptables

Si vous deviez résumer la France en trois mots

Liberté, culture et grandeur !

La liberté qu’elle incarne et qu’elle doit porter dans le monde, sa culture qui rayonne et dont nous sommes si fiers, et la grandeur sans laquelle « la France ne peut pas être la France » comme le disait le général de Gaulle.

Si vous deviez choisir trois livres qui vous ont marqué ou inspiré

L’usage du monde de Nicolas Bouvier, La Chartreuse de Parme de Stendhal, et les Mémoires de Raymond Aron.

Si vous deviez nous raconter votre plus grosse folie, avouable bien-sûr

Avoir démissionné de mon job en banque d’affaires, à peine un an après la fin de mes études à HEC, pour embarquer comme matelot sur Pen Duick VI, et partir pour 8 mois de navigation vers l’Antarctique.