Les livres politiques du mois de mai
Tous les mois, Émile vous propose de découvrir une sélection de livres abordant des questions politiques sous différents angles. Au sommaire de ce mois de mai, trois ouvrages qui retracent le parcours de figures politiques et deux essais qui proposent des réflexions sur le capitalisme et la transition écologique.
Cette sélection de livres a été réalisée par Emma Barrier
La Liberté guide nos pas
René La Combe, Compagnon de la Libération
« J’ai pris les armes pour la liberté de tous ». C’est en adoptant cette devise jusqu’alors attribuée à Vercingétorix que René La Combe, au crépuscule de sa vie, résume son parcours à sa famille.
Retranscrits par son fils Jérôme, et réunis sous forme de livre par sa petite-fille France, les témoignages de René La Combe permettent de reconstituer les grandes étapes de la vie de cette figure de la Résistance. Appelé à combattre sous les drapeaux français en 1939, René La Combe fit partie de ceux qui refusèrent de cesser la lutte en 1940. S’étant échappé des camps de prisonniers allemands, il rejoignit la Zone libre française et prit la tête du réseau Résistance-Fer, avant d’être dénoncé, puis déporté, pour finalement parvenir à fuir les Allemands une seconde fois.
Son engagement l’amena ensuite à faire carrière en politique ; il fut député du Maine-et-Loire pendant 30 ans, maire de son village Saint-Germain-des-Prés (près d’Angers) puis vice-président de l’Assemblée nationale. Pendant cette période, René La Combe eut l’occasion de nouer une amitié avec Jean Narquin, autre figure résistante et père de Roselyne Bachelot, qui a accepté de préfacer cet ouvrage au nom de l’amitié entre ces deux familles.
L’histoire, qui se déroule entre 1938 et 1944, embarque le lecteur dans les péripéties de ce fervent défenseur de la liberté qui fut d’ailleurs distingué Compagnon de la Libération par le général de Gaulle. Au service de la France durant toute sa vie, le parcours de René La Combe est aujourd’hui un très bel exemple d’engagement auprès des jeunes générations.
Les auteurs
Jérôme La Combe est le fils de René La Combe, il a recueilli son témoignage et ses souvenirs de guerre, qui ont ensuite été réunis dans un livre par France Martin-Monier, sa petite-fille. Diplômée de Sciences Po en 2000, elle est aujourd’hui journaliste-rédactrice pour le média zOOm Versailles. Après une carrière de 10 ans en tant que juriste, elle a co-fondé en 2014 la maison d’éditions Le Chapeau à plume, destinée à rendre l’Histoire accessible aux plus jeunes, au sein de laquelle elle a notamment co-écrit plusieurs ouvrages.
La Liberté guide nos pas, France Martin-Monier, Jérôme La Combe, Éditions Historien-Conseil, 224 pages, 24€.
Les années Lang - Une histoire des politiques culturelles, 1981-1993
Quarante ans après l’accession de la gauche au pouvoir en 1981, cet ouvrage dresse le bilan des politiques culturelles mises en œuvre entre la victoire de François Mitterrand et la seconde cohabitation. L’ancien ministre de la Culture, Jack Lang, fut à l’origine de multiples projets, dont on peut toujours évaluer la portée aujourd’hui : chantier du Grand Louvre, bicentenaire de la révolution française en 1989, colonnes de Buren en 1983, concert de SOS Racisme en 1985…
Sous la direction de Laurent Martin, Vincent Martigny et Emmanuel Wallon, 55 spécialistes d’histoire culturelle, de science politique et de sociologie proposent une réflexion sur « les années Lang ». Conçu sous la forme d’un dictionnaire critique, cet ouvrage comporte 108 entrées alphabétiques. Répartis en trois parties, leurs travaux ont pour ambition d’offrir une analyse de l’héritage remarquable de cette époque, considérée comme « l’âge d’or des politiques culturelles ».
Les auteurs
Dirigé par Laurent Martin, Vincent Martigny et Emmanuel Wallon, Les années Lang réunit la contribution de 55 chercheurs.
Diplômé de Sciences Po en 2012 et ancien élève de l’ENS de Saint-Cloud, Laurent Martin est aujourd’hui professeur d’histoire à l’université Paris III, après avoir été chargé de recherches au Centre d’histoire de Sciences Po. Il est spécialiste de l’histoire culturelle du monde contemporain et a récemment écrit Jack Lang. Une vie entre culture et politique (Éditions Complexe, 2008).
Historien et politologue, Vincent Martigny (promo 2012) est maître de conférences en science politique à l’École Polytechnique et chercheur associé au Cevipof de Sciences Po. En parallèle, il est également membre du comité de rédaction de la revue trimestrielle Zadig et de l’hebdomadaire Le 1, et produit l’émission L’Atelier du pouvoir sur France Culture. Il est notamment l’auteur de Dire la France : culture(s) et identités nationales : 1981-1995 (Presses de Sciences Po, 2016).
Professeur de sociologie politique à l’Université Paris Ouest-Nanterre, Emmanuel Wallon (promo 76) est spécialiste des politiques culturelles françaises et européennes, de la diplomatie culturelle et des relations entre arts et pouvoirs. Il est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages.
Maryvonne de Saint-Pulgent (promo 1973) signe l’avant-propos de cet ouvrage.
Les années Lang: une histoire des politiques culturelles, 1981-1993, Laurent Martin, Vincent Martigny, Emmanuel Wallon, La Documentation française, 600 pages, 27€.
Pierre Mauroy, passeur d’avenirs ?
Maire de Lille, député du Nord, Président de l’Internationale socialiste, puis Premier ministre et enfin sénateur, Pierre Mauroy a cumulé de nombreux mandats politiques durant lesquels il s’est battu pour réaffirmer l’importance du statut local en France. Cet ouvrage, qui retrace le parcours de l’homme politique, analyse surtout son rôle dans ce changement de statut de l’échelle locale, désormais considérée comme vecteur d’innovation, d’impulsion et d’efficacité.
Co-dirigé par Jérôme Dupuis et Maryvonne Prévot, Pierre Mauroy, passeur d’avenirs ? rassemble ainsi une vingtaine de contributions, individuelles ou collectives, illustrant les différentes facettes de celui qui fut à l’origine du premier acte de décentralisation en France.
Les auteurs
Jérôme Dupuis, diplômé de Sciences Po en 1980 et titulaire d’un DEA de sociologie des organisations, est aujourd’hui maître de conférences en sciences de gestion à l’Institut d’Administration des Entreprises (IAE) à Lille, dont il est l’ancien doyen. En parallèle, il est également chercheur au Laboratoire de Recherche Interdisciplinaire en Management et Économie, où ses travaux portent sur les systèmes locaux de performance dans les politiques publiques territoriales. Il a co-dirigé cet ouvrage avec Maryvonne Prévot, maîtresse de conférences habilitée à diriger les recherches en aménagement et urbanisme à l’université de Lille et membre du laboratoire Territoires Villes Environnement et Société.
Pierre Mauroy, passeur d’avenirs ?, Jérôme Dupuis, Maryvonne Prévot, Presses universitaires du Septentrion, 236 pages, 18€.
Progressistes pour le climat
L’objectif « zéro émission » de gaz à effet de serre d’ici 2050 est de plus en plus présent dans le débat national, en particulier dans le contexte de la campagne présidentielle. Pour y apporter sa contribution, Jacques Roger-Machart publie un nouvel ouvrage dans lequel il explique les différents enjeux soulevés par cet objectif. Préserver l’indépendance de la France, assurer la justice sociale, lutter contre le réchauffement climatique, trouver les ressources financières… Tant d’impératifs pour lesquels l’auteur propose des solutions audacieuses mais réalistes.
Pour substituer les énergies non carbonées aux consommations d’énergie fossile, il faudrait, selon lui, développer les énergies renouvelables et nucléaires tout en parvenant à économiser leurs coûts, pour les producteurs comme pour les finances publiques. Par ailleurs, il écrit qu’il s’agira également de suivre les ambitions du Green New Deal et renforcer le dispositif européen de taxation du CO2 d’une part, réformer la gouvernance nationale du système énergétique et abandonner l’ARENH de l’autre.
Au niveau européen comme au niveau français, Jacques Roger-Machart pose les bases qu’il estime fondatrices du mix énergétique qui permettra d’assurer la transition écologique.
L’auteur
À sa sortie de Sciences Po en 1965, Jacques Roger-Machart rejoint le service des études économiques d’EDF, avant de rejoindre l’action publique en 1975. Il occupe plusieurs postes durant sa carrière politique : conseiller général de la Haute-Garonne, maire, conseiller régional, député et enfin vice-président de l'Assemblée nationale. En 2000, Jacques Roger-Machart crée le cabinet de conseil en développement durable « Entreprises et Développement Régional », spécialisé dans les projets de transition énergétique en France et au Maghreb. Il a également animé un groupe d’experts de la Fondation Jean Jaurès sur les problématiques d’énergie et écrit Réussir nos PME - Esprit d’entreprise, initiatives publiques, les synergies (Dunod, 1991)
Progressistes pour le climat, Jacques Roger-Machart, Éditions Atlande, 288 pages, 19€.
Capitalisme et colonisation mentale
Dans cet ouvrage, David Muhlmann s’intéresse aux transformations du capitalisme durant les 30 dernières années. Émergence de la critique de la bureaucratie, entreprise « libérée » des managers, valorisation de l’entrepreneuriat... Le capitalisme semble proposer des formes plus douces de domination aux travailleurs et consommateurs de notre société. Pour autant, l’auteur tient à rappeler qu’il ne s’agit que d’une émancipation subjective et que la domination reste totale. Selon lui, toute notre vie sociale, jusqu’aux sphères les plus intimes, serait régie par la performance économique. Échange et négociation, esprit de calcul, utilité, instrumentalité… Le déploiement de ces nouveaux modes de fonctionnement organisationnels de l’entreprise connaît notamment son apogée avec la généralisation du télétravail. Ainsi, pour désigner toute cette mutation anthropologique, David Muhlmann utilise le terme de colonisation mentale et explique que le principal impact de ces logiques de production capitaliste reste environnemental.
L’auteur
Après un DEA de sociologie en 1997 à Sciences Po, David Muhlmann obtient un doctorat en sociologie des organisations. Il enseigne aujourd’hui la psychologie du travail et de l’organisation au sein du Master Ressources humaines de la rue Saint-Guillaume. David Muhlmann conseille également les dirigeants d’entreprise sur leurs transformations organisationnelles depuis 20 ans, et a notamment travaillé en tant qu’expert au sein du cabinet de conseil en stratégie McKinsey. Il est l’auteur de plusieurs autres ouvrages tels que Territoires de l’exil juif (Desclée de Brouwer, 2012) et Réconcilier marxisme et démocratie (Éditions du Seuil, 2010).
Capitalisme et colonisation mentale, David Muhlmann, Puf, 144 pages, 16€.