Gérard Larcher : "On ne peut pas confiner la démocratie éternellement !"
Dans la perspective des élections régionales et départementales, la rédaction d’Émile est allée à la rencontre de Gérard Larcher, président du Sénat, grand défenseur de la France des territoires. Quels sont les enjeux de ces scrutins ? En cette période si particulière de pandémie, quel rôle doivent jouer les collectivités territoriales ? Le projet de loi de décentralisation porté par le gouvernement est-il l’ultime chance pour Emmanuel Macron de recoller les morceaux avec les élus locaux ? Entretien.
Propos recueillis par Bernard El Ghoul, Sandra Elouarghi et Maïna Marjany
Photos : Manuel Braun
L’été suivant son arrivée à l’Élysée, en 2017, Emmanuel Macron avait instauré solennellement une Conférence nationale des territoires. Quel est, selon vous, le bilan de cette initiative ? Avez-vous le sentiment qu’il s’agit là d’un rendez-vous raté avec les territoires ?
Lorsque le président nouvellement élu décide de lancer la Conférence des territoires, à l’été 2017, nous avons été nombreux à voir cela comme un premier signe encourageant. Il annonce alors qu’il est prêt à passer une forme de contrat avec les collectivités territoriales ; il semble prendre en compte des enjeux de décentralisation, voire de différenciation, même si le mot n’est pas encore prononcé. Et puis, les choses vont se gâter. Lorsqu’arrivent ces rendez-vous de la Conférence nationale des territoires (CNT), les maires, les départements et les régions, toutes sensibilités confondues, ont le sentiment qu’on ne les a pas pris en compte. Ce rendez-vous est finalement devenu un lieu d’annonces et non pas l’espace de débat espéré. Cela conduit les acteurs du territoire à considérer qu’ils n’ont plus à y assister. Il me semblait que c’était la place du président du Sénat, au titre de la représentation parlementaire, d’être présent. Nous étions finalement, avec quelques collègues sénateurs, les seuls à porter la parole de ces collectivités et à échanger avec le représentant du gouvernement. Cet échec de la CNT, dès 2018, marque une rupture. Il a conduit à l’organisation de Territoires Unis [Assises réunissant les élus pour défendre les libertés locales, NDLR] pour reprocher au gouvernement le manque de concertation et la tentation de recentralisation. Ces prises de décisions, cette méthode verticale sans concertation sont encore d’usage aujourd’hui. C’est l’esprit du Conseil de défense tel qu’il fonctionne à l’heure actuelle.
Au cours du quinquennat d’Emmanuel Macron, d’autres événements ont-ils contribué au manque de dialogue entre le sommet de l’État et les territoires ?
La seconde difficulté est venue à la suite du mouvement des « gilets jaunes ». Pendant cette crise très dure, qui nous inquiète tous, les élus acceptent d’être des acteurs du Grand Débat, quelle que soit leur appartenance politique. Lorsque le président de la République annonce la tenue de cet exercice – qu’il réussit très bien d’ailleurs – il déclare qu’il a compris les territoires et qu’il va s’appuyer sur eux. Il explique notamment qu’il y aura un texte sur la décentralisation et c’est à cette occasion que l’on commence à parler de différenciation. Mais depuis les annonces de cette conférence de presse, peu de cases ont été cochées. S’ajoute à cela, même si ça ne concerne pas directement les collectivités, l’échec de la réforme des retraites, qui est aussi un exemple de la verticalité, de l’absence de travail avec le Parlement et d’un dialogue social tronqué. Je suis un ancien ministre du Travail, qui avait inscrit le dialogue social dans l’article L1 du Code du travail. Or sur ce texte, le gouvernement décidera même de recourir au 49.3 pour passer en force. Là encore, la méthode est brutale. Depuis, alors que la pandémie sévit dans notre pays, nous sommes toujours sous l’emprise du 49.3 avec une réforme bloquée. Cela peut vous sembler loin des collectivités, mais ça illustre une méthode.
Enfin, il y a la gestion de la pandémie. Nous voyons que les collectivités territoriales sont quand même, en ce qui concerne les masques, les tests et les vaccins, des acteurs agiles, souples, prêts à agir concrètement. Et au fond, l’État, contraint et forcé, s’appuie sur elles. Il y a eu un espoir quand le nouveau Premier ministre, Jean Castex, nous a parlé du couple préfet/maire. Mais encore faut-il que le préfet ait l’autorité sur les services de l’État au plan local et que le maire lui fasse confiance. Nous sommes aujourd’hui dans l’attente d’un texte qui n’en finit pas de venir.
Alors, certes, il y a le projet de loi baptisé « 4 D » pour décentralisation, déconcentration, différenciation et ce terme un peu rude de décomplexification. Au Sénat, nous avons dit : « Attention, que ce ne soit pas une loi 5 D, à laquelle on ajouterait le mot “disparition” ». C’est de Françoise Gatel, pas de moi. Le nouveau Premier ministre s’était engagé à présenter, fin janvier, un projet de loi devant tous les présidents de groupes politiques de l’Assemblée nationale et du Sénat ainsi que devant les présidents de partis. Pourtant, aucun texte n’a été présenté en Conseil des ministres fin janvier. Je m’en suis un peu ému publiquement. Le texte est parti (le 18 février 2021) au Conseil d’État et nous verrons à quel moment il sera inscrit à l’ordre du jour. Nous savons déjà qu’il ne contient pas tout ce que nous avons souhaité. D’autant qu’en juillet 2020, nous avions formulé 50 propositions, au terme d’un travail transpartisan, permettant de promouvoir un État territorial fort, des principes de déconcentration, de décentralisation et de différenciation dans la Constitution actuelle. En conclusion, je dirais que la relation avec les collectivités n’a pas tenu les promesses faites à l’été 2017.
Revenons à la pandémie. Avez-vous le sentiment que l’exécutif s’est suffisamment appuyé sur le Parlement et les collectivités territoriales pour gérer cette crise ou a-t-il encore fait usage de la méthode verticale que vous évoquiez ?
D’abord, cette crise nous a tous pris par surprise. Face à l’impréparation collective, nous nous sommes vite rendu compte que l’État était un peu dépassé, débordé. Sur le terrain, on voit des hommes et des femmes faire face, comme ils le peuvent, dans les hôpitaux, les collectivités, les services de l’État…
Dans ce contexte, quel est le rôle du Parlement ? Premièrement, cette période, un peu comme celle des attentats terroristes de 2015, nous amène à devoir examiner des textes d’urgence et notamment une loi d’urgence, une loi d’exception qui, au nom de la protection de la santé, réduit les libertés. C’est un sujet majeur, de réduire les libertés. Ces restrictions touchent celles d’aller et venir, de nous réunir, la liberté de culte, dont le Conseil d’État a d’ailleurs sanctionné le non-respect. Toutes ces réalités doivent être contrôlées par le Parlement. Le Sénat a voté des lois d’urgence, pas toutes. Nous avons voté les lois de finances rectificatives parce qu’il fallait mettre l’économie sous perfusion pour qu’elle tienne le coup. Rappelons tout de même que nous sommes aujourd’hui à près de 64 % de dépenses publiques contre 52 % auparavant.
Pourquoi n’avons-nous pas voté la dernière loi d’urgence ? Parce que nous pensons qu’il faut régulièrement contrôler l’état des libertés. Ensuite, le recours immodéré de ce gouvernement aux ordonnances nous pose problème. Nous en comptons actuellement plus de 230 et depuis le début de la crise sanitaire, nous en avons eu 83. C’est un record quasi historique et nous pensons que c’est une manière d’amputer le Parlement. Sur le sujet majeur qu’est celui des libertés, nous pensons que le Sénat doit exercer son rôle de contre-pouvoir. Pas simplement parce que la majorité serait différente de l’Assemblée nationale, mais parce que nous avons une double responsabilité, celle de nous faire l’écho du territoire, mais aussi celle d’être les gardiens des libertés, ce qui est consubstantiel au Sénat. Pas simplement les libertés locales, mais les libertés tout court. Nous avons par exemple proposé un amendement qui a été voté à l’unanimité, y compris par le groupe de la majorité présidentielle, pour signifier qu’il fallait territorialiser un certain nombre de décisions. Le gouvernement a finalement rejeté cette proposition alors qu’on voit bien aujourd’hui qu’il faut en passer par là sur certains territoires (Alpes-Maritimes, Dunkerque, Île-de-France, etc.).
Le rôle du Parlement, ce sont aussi les missions de contrôle telles que la commission d’enquête sur la gestion de la crise du Covid à l’Assemblée nationale et au Sénat. Mais à la différence de l’Assemblée, nous avons poursuivi ce contrôle sous la forme d’une mission commune d’information, toujours en cours et présidée par Bernard Jomier, sénateur socialiste. Quel en est l’objectif ? Dix-neuf sénateurs, avec des moyens financiers autonomes, vont suivre non seulement la crise sanitaire, mais également les effets de celle-ci en termes de crise sociale, sociétale, et économique. Pour la troisième année, nous avons des crédits autonomes pour effectuer nos études et analyses, parce que n’avoir que des éléments financiers transmis par Bercy pour faire du contrôle ne nous satisfaisait pas.
Pensez-vous que l’exécutif a profité de la crise du Covid-19 pour opérer une recentralisation ?
En fait, cela fait 10 ans que l’on est en pleine recentralisation, même si dire cela bouleverse parfois mes amis politiques. Nous avons réduit l’État territorial. Nous avons remplacé un certain nombre de ressources financières qui dépendaient des collectivités territoriales par des dotations. Nous avons, par la multiplication des agences de l’État, des normes et des règlements, reperdu beaucoup de terrain par rapport aux avancées de la réforme de François Mitterrand et de Gaston Defferre pour la décentralisation. Et ce processus n’a pas débuté en mai 2017 ! J’y vois un mouvement ayant commencé avec la Révision générale des politiques publiques (RGPP) qui a affaibli l’État territorial. Ensuite, pour satisfaire la demande de Bruxelles de respecter les 3 % de dette publique, il a fallu faire des coupes drastiques. Ce sont les collectivités territoriales et la Sécurité sociale qui ont fait l’essentiel de l’effort quand l’État n’en faisait pas, sous le quinquennat de François Hollande.
Finalement, Emmanuel Macron ne ferait que poursuivre cette politique, malgré un affichage de bonnes intentions avec le projet de loi 4 D sur la décentralisation, que vous avez évoqué au début de cet entretien ?
Je crois qu’au fond, le président n’est pas décentralisateur. Mais il n’y a pas que lui : au sein de ma famille politique, certains ne sont pas de grands adeptes de la décentralisation. Il pense certainement que les collectivités sont des empêcheurs de décisions et de mises en œuvre rapides.
Je suis persuadé qu’on ne redressera pas ce pays sans le levier des territoires et je suis très inquiet de l’évolution actuelle. J’ai le sentiment que le pays va sortir de cette crise encore plus fracturé qu’avant, pas uniquement une fracture rurale, entre les petites villes et les métropoles. À travers la résilience des économies locales, certains tissus économiques vont sortir renforcés, notamment le secteur des services, avec une forme d’accoutumance un peu forcée à la digitalisation acquise pendant le confinement. À l’inverse, certains territoires vont être frappés de plein fouet. Par exemple, l’industrie aéronautique sera fragilisée pour une assez longue période. Même si, après la pandémie, les trajets en avion vont reprendre progressivement, je pense que dans 10 ans, l’industrie aéronautique ne ressemblera plus à ce qu’elle est aujourd’hui. Le secteur automobile va lui aussi se transformer puisque nous allons vers des mobilités différentes. Dans cette France davantage fracturée, le plan de relance sera essentiel. Et la question de la présence des services publics sera essentielle. On a cru que le numérique allait tout remplacer, mais dans ces territoires, les services publics restent importants. Certes, on a beaucoup progressé dans l’équipement numérique du territoire et il faut souligner que ces territoires sont redevenus attractifs parce que la peur de la ville et de l’urbanisation suscitée par le Covid leur a redonné des chances. Il faut les aider davantage et cela va être un sujet, me semble-t-il, y compris pour les élections à venir.
Si l’on souhaite donner des pouvoirs plus importants et une plus grande souplesse aux collectivités territoriales, comment faire pour maintenir le principe d’égalité territoriale ? Jusqu’où peut-on expérimenter sans déformer le pacte républicain ?
D’abord, il faut bien comprendre que le territoire est divers. Moi qui suis d’origine gaulliste, je crois au rôle de l’État régalien sur des sujets majeurs. Je crois à un État attentif à l’équité, mais l’équité, ce n’est pas l’uniformité. Vous ne pouvez pas répondre aux problèmes d’un vieux territoire d’industrie de la même manière qu’en Île-de-France. Prendre en compte la diversité des situations territoriales et des besoins, cela nous conduit à des réponses différentes, qui peuvent et doivent respecter la Constitution.
Par exemple, simplifier et adapter l’architecture locale. Faut-il organiser toutes les intercommunalités sur le même modèle ? Je suis sûr que non. Est-ce qu’il faut penser les compétences entre régions, départements et intercommunalités de la même manière partout ? Je pense que non. Et c’est d’ailleurs une des conclusions que vous verrez dans les 50 propositions du Sénat : trouver ces souplesses tout en permettant à l’État d’être garant de l’équité.
Prenons l’exemple d’un département un peu lointain : Mayotte. Quand vous constatez que là-bas, il y a trois fois plus de pauvreté, il est évident que le rôle de l’État est d’assurer l’équité, mais aussi de permettre aux responsables locaux de s’adapter. Dernièrement, j’ai été appelé au secours par les parlementaires de Mayotte (dont la majorité sont des élus LREM) et le président du conseil départemental face à l’incroyable montée de l’insécurité, de la pauvreté et de la pandémie. Ils ont envie qu’on leur donne les moyens et la capacité de travailler et de s’adapter. On doit assumer et prendre nos responsabilités. Est-ce qu’on gère de la même manière ? Ma réponse est non. D’ailleurs, nous avons des situations en outre-mer ou en Corse qui montrent que dans la Constitution, il peut y avoir des aspects différenciés.
Sans actions rapides et ciblées sur les territoires en difficulté, pensez-vous que le fossé territorial va se creuser davantage ?
Ce fossé risque de s’aggraver et je ne voudrais pas que cela se traduise par des votes populistes. Or le sentiment d’abandon, le sentiment d’être en dehors de la République, le sentiment d’être au bout de la table est fort. Le vote populiste a souvent été un vote urbain, reflétant notamment un certain nombre de sujets de coexistence entre communautés. C’est devenu un vote territorial assez profond, que ce soit concernant l’extrême gauche ou l’extrême droite. Je pense que pour la démocratie et selon la conception que j’ai de l’unité de mon pays, c’est un sujet qu’il va falloir prendre vraiment à bras-le-corps.
Venons-en aux prochaines élections départementales et régionales. Tout d’abord, craignez-vous qu’elles soient à nouveau décalées ?
L’aggravation de la crise sanitaire pourrait provoquer un nouveau report. Il n’y a pas de clause de revoyure donc si elles devaient être à nouveau reportées, ce ne serait pas par simple décision gouvernementale, mais par un vote du Parlement. J’ai échangé il y a peu avec le président du Bundesrat [Conseil fédéral, NDLR] allemand et il m’a confirmé la tenue des élections territoriales dans les Länder allemands, alors soyons capables de le faire nous aussi. Ces élections régionales et départementales sont importantes ; on ne peut pas confiner la démocratie éternellement !
Quels sont, selon vous, les principaux enjeux des élections à venir ?
L’enjeu majeur est celui de la gestion des territoires, ce qui rejoint le sujet du rôle et de la place des territoires que nous avons évoqué en discutant du projet de loi 4 D. Prenons l’exemple du système de santé : si ce système centralisé fonctionnait si bien, ça se saurait ! Or nous voyons bien que la gestion des Agences régionales de santé ne peut pas passer uniquement par le rouage de l’avenue de Ségur qui est, au passage, le ministère le plus centralisé. Donc la question de confier la présidence du conseil de surveillance des Agences régionales de santé aux régions, c’est un vrai sujet dont il faut discuter. Sur le médico-social, il y a aussi beaucoup à faire. Quand on voit ce qui s’est passé dans les Ehpad, qui ont différentes tutelles, la question du maintien en l’état se pose. Doit-on continuer de cette manière ? Je ne pense pas. Cela doit être le rôle du département.
Est-ce qu’il faut donner au bloc communal un rôle plus important en ce qui concerne la culture, le sport ou même la santé ? On observe que c’est souvent le bloc communal qui porte la volonté de créer des centres de santé afin de lutter contre la désertification médicale. Voilà pourquoi j’avais demandé au Premier ministre, le 1er septembre dernier, de territorialiser au moins 50 % du plan de relance, et au ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, de prévoir un volet « territorialisation » du plan de relance.
Vous nous avez exposé les enjeux thématiques de ces élections. Quels en sont, selon vous, les enjeux politiques ? Êtes-vous, par exemple, inquiet d’une poussée des extrêmes ?
Tout d’abord, ce que nous avons constaté aux dernières régionales, c’est un succès et une inversion. Le centre droit et la droite ont regagné la majorité des régions, qui étaient quasiment toutes à gauche. C’était en plus dans un périmètre régional modifié. Nous allons assister aux deuxièmes élections dans ce nouveau périmètre. Aujourd’hui, on voit l’émergence de la force et de la puissance des régions. Cela inquiète, parfois, le pouvoir central.
L’enjeu politique dépendra de la capacité des équipes à montrer qu’elles peuvent réduire ces fractures, ne pas donner le sentiment aux citoyens qu’ils sont abandonnés parce qu’ils vivent au fin fond d’une vallée ! De son côté, l’Occitanie aura à gérer la crise de l’aéronautique, qui sera un sujet majeur et touchera les espaces ruraux, puisque beaucoup de sous-traitants y sont installés. Dans le Lot et le Gers, l’impact de la crise aéronautique sera, vous le verrez, ravageur.
Vous posiez la question des extrémistes et des poussées extrêmes. Naturellement, le Rassemblement national peut, dans certains territoires, faire des scores importants, mais je pense que le vrai sujet du Rassemblement national, ce sera l’élection présidentielle.
Pour conclure, pouvez-vous nous parler du calendrier législatif particulièrement chargé qui attend le Parlement d’ici la fin du quinquennat d’Emmanuel Macron ?
Il reste quatre mois utiles avant les projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale, qui clôtureront le quinquennat. Deux textes régaliens majeurs sont examinés au Sénat. D’abord, une proposition de loi intitulée « Sécurité globale » [première lecture au Sénat mi-mars, NDLR]. Elle a beaucoup fait parler d’elle à l’automne, lors de son examen par l’Assemblée nationale. C’est un texte utile qui parle de la question des polices municipales, du continuum de sécurité, mais qui évoque également la protection des policiers et des gendarmes, l’utilisation des drones… Nous y sommes très attentifs, car se posera aussi la question de la liberté de la presse et des libertés publiques. Nous devons veiller à cet équilibre entre sécurité et liberté, de manière très concrète, très pratique.
Récemment, nous avons débattu du texte sur les valeurs et principes de la République… Vous êtes ici dans une maison qui est attachée à quelques grands textes. Le premier est la loi qui fonde la liberté de gestion des communes par les citoyens, c’est la loi communale, qui permet le droit de délibération. Puis il y a la loi de 1901, qui donne la liberté d’association et au fond, le cœur de la vie associative – mis à part les grandes associations –, c’est le territoire. Enfin, il y a la loi de 1905. C’est dans ce bureau [celui du président du Sénat, NDLR] qu’a eu lieu le compromis entre Combes et Briand. Quand Briand déclare « la loi doit protéger la foi tant que la foi n’entend pas dicter la loi », tout est dit. Comment fait-on pour respecter le principe de laïcité ? Le principe est clair : la loi doit protéger la foi. Mais comment s’y prend-on ? Ce sont des sujets passionnants et essentiels pour la cohésion de la République.
Pour en savoir plus sur ce sujet, vous pouvez consulter, sur le site du Sénat, une série d’entretiens croisés entre Gérard Larcher et le philosophe Marcel Gauchet, intitulée « Loi de 1905 : Laïcité, Religions et République ».
Cet entretien a été publié dans le numéro 21 d’Émile, paru en avril 2021.