Le billet de Pascal Perrineau - L’expression électorale d’un nouveau clivage
Les électeurs ont rendu leur premier verdict à l’issue du premier tour et ont engagé un profond bouleversement de la vie politique. Les candidats qui représentaient les deux grands partis autour desquels toutes les alternances politiques se sont organisées sous la Vème République, ont réuni à eux deux un électeur sur quatre. Les candidats de la protestation radicale, qu’elle soit de droite ou de gauche, ont rassemblé à peu près un électeur sur deux. Enfin, les deux candidats arrivés en tête se sont inscrits en faux contre le biséculaire clivage entre la gauche et la droite. Marine Le Pen prétend rejeter ce vieux clivage au profit de celui qui opposerait les « patriotes » aux « mondialistes ». Emmanuel Macron renvoie l’opposition gauche-droite au magasin des antiquités politiques et se revendique comme étant « et de gauche et de droite ».
La campagne qui commence s’émancipe ainsi de la bipolarisation traditionnelle qui a accompagné tous les seconds tours –ou presque- des élections présidentielles depuis 1965. Dès le 23 avril au soir, les soutiens à Emmanuel Macron sont venus à la fois de la droite et de la gauche. Et, le premier affrontement entre les deux finalistes a eu lieu, le 25 avril, autour de l’avenir de l’usine Whirlpool d’Amiens qui pose la question du destin des sites industriels français dans la globalisation. Ce dernier enjeu est au cœur du clivage essentiel qui structure l’affrontement entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron et qui est celui de la « société ouverte » face à la « société du recentrage national ».
Un vieux monde politique se meurt, un nouveau monde politique s’invente et les électeurs en seront, le 7 mai prochain, les principaux arbitres.