Le billet de Pascal Perrineau - Les premiers pas du nouveau pouvoir
Le nouveau pouvoir est en place. Le Président préside et sculpte le marbre présidentiel érodé dont il a hérité, le Premier ministre gouverne et tente de s’ériger en leader de la nouvelle majorité qu’il appelle de ses vœux, les ministres découvrent leur département ministériel souvent profondément remanié et envoient les premiers signaux des nouvelles politiques publiques à mettre en œuvre.
Tout cela a un air de « déjà vu » et pourtant… Un parfum d’incertitude et d’innovation flotte dans l’air. Jamais sous la Vème République une telle expérience n’avait été tentée. Accoucher d’une majorité législative en quelques semaines, non pas à partir de rien mais à partir de morceaux épars venus de la gauche, du centrisme, de la droite et de la « société civile », constitue assurément une « première ».
Le point de rassemblement de ces « morceaux épars » est pour l’instant un homme –le Président-, une volonté de rupture des cadres anciens –le clivage entre la gauche et la droite, les partis traditionnels…- et un réformisme aux allures de « troisième voie ».
Il s’agit, en quelques semaines, de rendre attractive cette triade et de « positiver » le rejet, massif dans l’opinion, d’un personnel ancien, d’organisations fatiguées et d’alternances de gauche et de droite qui n’ont pas convaincu. Pour l’instant, les sondages d’intentions de vote pour les prochaines élections législatives montrent que la tâche n’est pas impossible et que le nouveau pouvoir bénéficie d’une attente bienveillante.
La majorité sera-t-elle absolue, relative, solide, fragile, plurielle ou homogène ? Les électeurs en décideront.
Restera la tâche essentielle, celle de la reconstruction de la crédibilité de l’action publique. La fermeté des premiers pas du Président sur la scène internationale, la volonté du nouveau pouvoir de s’attaquer à quelques « vaches sacrées » dans le domaine social ou éducatif et un certain « discours de vérité » montrent la voie.
Certaines pratiques qui attestent de la résistance de moeurs anciennes dans un monde qui se veut radicalement nouveau ou encore le poids massif de la technostructure dans l’appareil du pouvoir, montrent que le vieux monde résiste et qu’aucune rupture n’est exempte de continuité. Parfois, le passé n’est pas aussi loin de nous que l’avenir…