Conférence - Le rôle du Parlement sous l'ère Macron

Conférence - Le rôle du Parlement sous l'ère Macron

Lundi 12 février, la rédaction d'Émile réunissait trois sénateurs (Marie-Noëlle Lienemann, Roger Karoutchi et Julien Bargeton) et trois députés (Clémentine Autain, Amélie de Montchalin et Éric Woerth) au Sénat afin de débattre du rôle du Parlement depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Cette table-ronde, animée par les journalistes Delphine Girard (Public Sénat) et Arnaud Ardoin (LCP-AN) a permis aux intervenants de parler de leur propre expérience en tant que parlementaire depuis l'élection d'Emmanuel Macron, mais aussi d'échanger sur les réformes des institutions à venir. Retour sur leurs interventions

Peut-on parler d'un affaiblissement du Parlement ? 

Dès le début de la conférence, on remarque une certaine divergence d’opinions entre les parlementaires appartenant à la majorité présidentielle et ceux qui font partis de l’opposition. Pour les premiers, il n’y a pas d’affaiblissement du pouvoir du parlement, seulement un changement dans la manière de travailler. 

De leur côté, Eric Woerth, Clémentine Autain et Marie-Noëlle Lienemann, ont constaté une montée en puissance de l’exécutif depuis l'élection d'Emmanuel Macron, remettant en cause l’équilibre des pouvoirs. 

Ainsi, pour Marie-Noëlle Lienemann : « Emmanuel Macron a fait le choix d’affaiblir la démocratie représentative, incarnée par le Parlement, au profit d’une démocratie où le chef et l’exécutif sont renforcés. Et où le participatif n'est qu'une aide à la décision. » 

Les parlementaires sont en revanche tous d’accords sur la nécessité d’une réforme du Parlement, mais les modalités de ces transformations diffèrent. Marie-Noëlle Lienemann et Clémentine Autain, de leur côté, affirment la nécessité de construire une VIème République, basée notamment sur une participation plus grande des citoyens dans la vie démocratique de leur pays. 

Pour d’autres, des réformes doivent être menées, mais en respectant les cadres et les règles de la Vème République. C'est le cas de Roger Karoutchi, par exemple, qui déclare : « Le Parlement doit accepter de voir son pouvoir d’amendement encadré ». Mais aussi de Julien Bargeton ou d'Amélie de Montchalin. 

L'entrée en nombre de la société civile à l'Assemblée nationale 

Les parlementaires ont ensuite débattu de la question de l'entrée de la société civile à l’Assemblée nationale, en juin dernier, notamment dans les rangs de La République en Marche. Les représentants du parti du Président présents à cette conférence ont témoigné leur enthousiasme vis-à-vis de ce renouveau sur les bancs du Palais Bourbon. 

D’autres nuancent cette idée d’entrée massive de la « société civile » à l’Assemblée nationale, arguant que tout parlementaire est passé par le privé ou le public avant d’être élu. Pour Eric Woerth, cette utilisation du terme « société civile » nourrit même l'antiparlementarisme. 

Enfin, Clémentine Autain et Marie-Noëlle Lienemann considèrent que le débat n'est pas sur cette question d'entrée ou de non-entrée de la société civile au Parlement, mais dans le manque de diversité, dans l'homogénéité sociale, qui persiste au Sénat et à l'Assemblée. Pour elles, ceux qui les composent ne représentent pas la société française dans son ensemble, et c'est sur cela qu'il faut travailler dans le futur. 

Réduire le nombre de député, une bonne idée ? 

Les parlementaires ont également réagi à certains points du sondage que nous avons mené auprès des anciens et des étudiants de Sciences Po. Un des éléments de clivage de nos intervenants a été la question de la réduction du nombre de parlementaires, largement plébiscitée par ceux qui ont répondu à notre enquête : 

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Julien Bargeton, par exemple, soutient cette idée. 

Au contraire, pour Clémentine Autain, le nombre actuel de députés est une bonne chose. Dans un contexte où le dialogue entre les citoyens et les politiques est parfois compliqué, où les Français perdent confiance dans leurs dirigeants, elle estime que cette représentativité, cette présence nombreuse des parlementaires dans tous les territoires est une nécessité. Clémentine Autain considère donc qu'abaisser leur nombre va provoquer une augmentation du nombre de collaborateurs, qui eux ne doivent pas rendre directement des comptes aux électeurs, ce qui n'est pas une bonne chose dans une démocratie représentative. 

La "théâtralisation" des questions au Gouvernement peut-elle se justifier ? 

À la fin de la conférence, une question posée par une personne du public a, de nouveau, clivé les parlementaires présents. Le sujet de discorde portait sur de la « théâtralisation » du comportement de certains élus au sein des hémicycles, notamment pendant les questions au gouvernement, qui pourrait être préjudiciable à l'image de l'institution parlementaire. Amélie de Montchalin et Eric Woerth ont abondé dans ce sens :

A l’inverse, Clémentine Autain justifie l’utilisation de méthodes de communication parfois non-conventionnelles afin de pouvoir être entendu lorsque l'on est un groupe minoritaire à l'Assemblée. 

Compte-rendu rédigé par Alexandra Slon

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