Jérôme Sainte-Marie : "Les élections partielles de dimanche sont un retour aux réalités démocratiques"

Jérôme Sainte-Marie : "Les élections partielles de dimanche sont un retour aux réalités démocratiques"

Dans une interview au Figarovox, le politologue Jérôme Sainte-Marie décrypte les résultats des élections législatives partielles du week-end dernier. Remportées toutes les deux par les candidats des Républicains, elles ont porté un premier coup à «l'état de grâce» dont bénéficiait jusqu'à présent Emmanuel Macron. 

Ce dimanche, LR l'a emporté 2 à 0 contre LREM… Ce ne sont pas les résultats sportifs, mais ceux des deux législatives partielles qui ont eu lieu dans le Val d'Oise et à Belfort. Est-ce (déjà) la fin de la «Macronmania», pour reprendre le titre en une de L'Express en juin dernier?

Depuis 1982, les premières élections législatives partielles sont toujours scrutées comme pouvant annoncer la fin de «l'état de grâce». Le 17 janvier de cette année-là, dans quatre circonscriptions, l'opposition l'avait emporté sur la gauche dès le premier tour. Ce fut d'autant plus un coup de tonnerre que François Mitterrand bénéficiait encore d'une forte popularité, 59 % des Français, selon la SOFRES, lui faisant alors confiance comme Président de la République. En janvier 2018, selon ce même indicateur, la cote de confiance d'Emmanuel Macron s'établissait à 44 %, contre 51 % de défiance, en progression de six points depuis novembre. Autant dire que l'époque est radicalement différente, et que l'on a beaucoup abaissé le niveau d'exigence en matière de soutien populaire aux politiques. Pour Emmanuel Macron, il faut surtout saisir la profonde originalité de sa situation. Élu à partir d'un score de 24 % le 23 avril, le second tour ayant été un choix essentiellement négatif, il a depuis considérablement élargi sa base politique. Ce phénomène a suscité un extraordinaire engouement dans cette mince partie de la population ayant un accès facile aux médias, et dont la sociologie est proche des premiers soutiens de la geste macronienne. Par rapport à ces dithyrambes, les scrutins de dimanche dernier font office de rappel aux réalités démocratiques.

Le score le plus frappant dans ces deux élections est le taux d'abstention: 74 % d'un côté, 80 % de l'autre… Emmanuel Macron a-t-il éloigné les Français de la politique?

Une telle assertion serait assez injuste. L'abstention s'étend en France depuis des décennies pour la plupart des scrutins, et a connu une forte extension spectaculaire lors des élections législatives de 2017: plus de 51 % au premier tour, et 57 % au second. La logique du quinquennat a donc aggravé le phénomène, ainsi que la dislocation du système politique français, qui n'est plus structuré par le clivage gauche-droite. Il semblerait cependant que les premiers mois du mandat d'Emmanuel Macron n'aient pas suscité le regain civique annoncé. Si l'on considère la dernière vague du «baromètre de la confiance politique», menée en décembre par l'institut OpinionWay pour le Cevipof, il apparaît que l'image des institutions démocratiques s'est encore dégradée. La proportion de ceux qui déclarent ne pas s'intéresser à la politique atteint le niveau de 48 %, le plus haut mesuré par cet indicateur depuis sa création il y a neuf ans. Que l'image d'Emmanuel Macron soit meilleure que celle de son prédécesseur est une évidence, mais cela ne signifie pas une adhésion populaire massive à la personne ou à son projet. La France ne s'ennuie pas, elle est dans l'expectative.

Le leitmotiv de l'exécutif semble être, depuis l'automne, «je fais ce que j'ai promis», infographies et cascades de publications sur les réseaux sociaux à la clé. Baisse de charges pour les entreprises, allégement de la fiscalité des ménages, moralisation de la vie publique, transition énergétique… Le président a-t-il donné satisfaction à ses électeurs?

D'après l'IFOP, 50 % des Français se disent satisfaits d'Emmanuel Macron comme Président de la République. À ce stade du mandat, ils étaient 38 % pour François Hollande et 47 % pour Nicolas Sarkozy. C'est aussi dix points de plus qu'en août. Parmi les sympathisants de La République en Marche, ils sont 94 % à se déclarer satisfaits. Voici trois indications convergentes d'un début de quinquennat réussi. Si l'on ose dire, le macronisme se prouve par la marche, il constitue une force politique qui se construit par l'action de l'exécutif, bien plus que par l'adhésion à un programme, et encore moins par la fidélité à une tradition, du fait de son originalité. Pour l'heure, non seulement il n'a pas déçu ses électeurs originels, mais il a su séduire une bonne partie de ceux de François Fillon, notamment par son volontarisme réformateur. En outre, les attaques qu'il subit venant de certains milieux dits de gauche sur les enjeux de l'immigration et de l'éducation n'ont pu que le renforcer à droite. Il est cependant plusieurs points qui entravent l'élargissement de sa base. Tout d'abord, selon Viavoice, à peu près deux Français sur trois se considèrent comme des «perdants» de ses réformes. Ensuite, l'augmentation de la CSG subie par une majorité de retraités apporte au parti Les Républicains une véritable bouffée d'oxygène. Donc, effectivement, Emmanuel Macron n'a pas déçu sa base de départ, mais celle-ci étant minoritaire, et comme les seconds tours se jouent rarement face à un Front national stigmatisé, il a besoin de l'agrandir encore...

Lire la suite de l'interview sur le site du Figarovox

 

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