Front national : fin de cycle ou début d'une nouvelle séquence?
Depuis la campagne présidentielle, l’image de la présidente du Front national semble s'être dégradée auprès des Français, y compris chez ses sympathisants. C’est ce qu’indique un sondage publié, ce mercredi 7 mars, par l'Institut de sondage Kantar Sofres Onepoint. Emmanuel Rivière, Président de Kantar Public, analyse pour Émile les résultats et les enseignements de ce sondage.
A l’issue de 7 années de succès électoraux successifs pour le Front national, notre baromètre annuel (Kantar Sofres onepoint pour Le Monde, France Info, LCP et Public Sénat) fait apparaître une chute significative du soutien au FN, qui pourrait signifier la fin du cycle ouvert par l’accession de Marine Le Pen à la présidence du parti.
La proportion de Français se déclarant en accord avec les idées du FN recule de 9 points, à 24%, alors que ce taux était resté supérieur à 30% depuis janvier 2012. Marine Le Pen était clairement la principale cause de l’amélioration de l’image du FN et de sa capacité à conquérir de nouveaux électeurs, elle semble être aujourd’hui au cœur de ce phénomène de perte de l’influence du FN.
Sur l’image de la Présidente du Mouvement, les évolutions sont particulièrement marquées, allant jusqu’à 20 points perdus s’agissant de sa capacité à prendre des décisions. 16% des Français considèrent qu’elle ferait une bonne Présidente de la République, ils étaient 24% il y a un an. La campagne présidentielle de 2017, dont Marine Le Pen fut un temps pressentie pour arriver en tête au 1er tour, y est sans doute pour beaucoup.
La thématique de la sortie de l’Euro, sur laquelle elle a semblé en difficulté en fin de campagne et lors du débat l’opposant à Emmanuel Macron, apparaît dans cette vague de notre baromètre comme une proposition très peu porteuse, largement rejetée par les Français, y compris par presque la moitié des sympathisants FN.
Toutefois il semble que des fragilités se soient manifestées avant même la campagne. Sa capacité perçue à rassembler, qui fut une de ses marques de différenciation par rapport à Jean-Marie Le Pen, a commencé à se dégrader dans les jugements dès 2015, et plus fortement après les insuccès du FN lors des régionales de décembre 2015.
Ces reculs mesurés dans notre baromètre ne signifient pas pour autant un retour à la case départ, effaçant le travail de dédiabolisation du FN. Ce à quoi nous assistons, c’est moins à une « rediabolisation » qu’à une décrédibilisation d’un parti qui semble de moins en moins perçu comme ayant la capacité de participer à un gouvernement (28%, -10 points). Cela pose la questions de la stratégie future du parti, notamment s’agissant des alliances.
De manière significative, dans ce baromètre orienté à la baisse, le seul indicateur qui soit stable est la proportion (43%) de sympathisants Les Républicains prêts à envisager des alliances avec le FN. Les sympathisants Front national y demeurent de leur côté très ouverts, à plus de 76%.
La perspective d’un changement de nom pourrait favoriser ce type de rapprochement. Cette option obtient le soutien de 59% des sympathisants FN. Cette fin de cycle pourrait donc signifier l’ouverture d’une nouvelle séquence, dans ce contexte général de reconfiguration politique. Et tout indique que cette nouvelle séquence ne se fera pas sans Marine Le Pen, dont 86% des sympathisants Front National souhaitent qu’elle soit leur candidate en 2022.